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Roland Barthes : "L’activité structuraliste" ou l’art du montage ?

Une définition du montage ?

mardi 15 novembre 2005


Le but de toute activité structuraliste, qu’elle soit réflexive ou poétique, est de reconstituer un " objet " de façon à manifester dans cette reconstitution les règles de fonctionnement (les " fonctions ") de objet. La structure est donc en fait un simulacre de l’objet, mais un simulacre dirigé, intéressé, puisque l’objet imité fait apparaître quelque chose qui restait invisible, ou si l’on préfère, inintelligible dans l’objet naturel. L’homme structural prend le réel, le décompose, puis le recompose ; c’est en apparence fort peu de choses (ce qui fait dire à certains que le travail structuraliste est " insignifiant, inintéressant, inutile, etc. "). Pourtant, d’un autre point de vue, ce peu de chose est décisif ; car entre les deux objets, ou les deux temps de l’activité structuraliste, il se produit ; du nouveau, et ce nouveau n’est rien moins que l’intelligible général : le simulacre, c’est l’intellect ajouté à l’objet, et cette addition a une valeur anthropologique, en ceci qu’elle est l’homme même, son histoire, sa situation, sa liberté et la résistance même que la nature oppose à son esprit (...).

L’activité structuraliste comporte deux activités typiques : découpage et agencement. Découper le premier objet, celui qui est donné à l’activité de simulacre, c’est trouver en lui des fragments mobiles dont la situation différentielle engendre un certain sens ; le fragment n’a pas de sens en soi, mais il est cependant tel que la moindre variation apportée à sa configuration produit un changement de l’ensemble (...). Les unités posées, l’homme structural doit leur découvrir ou leur fixer des règles d’association : c’est l’activité d’agencement, qui succède à l’activité d’appel. La syntaxe des arts et des discours est, on le sait, extrêmement variée ; mais ce que l’on retrouve dans toute oeuvre de projet structural, c’est la soumission à des contraintes régulières, dont le formalisme, improprement incriminé importe beaucoup moins que la stabilité ; car ce qui se joue à stade second de l’activité de simulacre, c est une sorte de combat contre le hasard... : c’est par le retour régulier des unités et des associations d’unités que l’oeuvre apparaît construite, c’est à dire douée de sens (...).

BARTHES Roland ; " L’activité structuraliste " (1963) ; in Essais critiques, ed. 1964, pp.215-218.


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